Meilleurs souvenirs de Guingamp

Guingamp, 3 minutes d'arrêt...Nous arrivons sous une petite pluie bretonne et prions Saint François que le temps soit clément pour le concert en plein air du lendemain, seul passage annuel de l'ange en France.

Jeudi 16 août 16H : nous sommes devant l'entrée du jardin public écoutant la voix d'Angelo répéter quelques morceaux de L'Infinitamente Piccolo. Personne d'autre que nous sur le trottoir, l'oreille collée contre les grilles, hélas bien cadenassées. Difficile d'escalader le mur, un peu trop haut pour qui n'a ni tenue ni forme olympiques. Nous trouvons une autre entrée à l'arrière gardée par des cerbères locaux, impossibles à attendrir. Nous partons noyer notre déception de fans dans le cidre, au milieu d'une foule de touristes anglais, allemands et italiens.

21h : enfin, on y est ! Nos prières ont été exaucées, pas de pluie, pas de vent. Les fervents du Maestro sont déjà aux premières loges assis sur l'herbe. Ambiance entre kermesse locale et Woodstock -d'assez loin quand même- la norme étant plutôt aux sandwich coca qu'aux joints et à la bière. Mais bon ! On s'installe pas loin de la buvette et le concert démarre avec en vedette américaine un très bon groupe de musique irlandaise : les Churchfitters, ce qui signifie " Sacristains ".Amusante coïncidence, relevée par un journaliste local, entre le porte- parole de Saint François et le nom de ce groupe...Un vent de mysticisme soufflerait-il sur Guingamp et son festival ? Les braillements d'une poignée de non-initiés accrochés à la buvette nous ramènent à la réalité : il est 22h30 et notre artiste bien-aimé n'a pas encore montré un centimètre de sa crinière.

22h35 : les lumières baissent jusqu'à un halo de bleu et " il "est là : une voix de femme lit le Cantique des Créatures, et c'est parti pour presque 2 heures de bonheur . Les orchestrations du concert, différentes de celles du CD pour quelques morceaux, nous ravissent. Et quel plaisir d'entendre Angelo en français, avec un charmant petit accent italien, présenter chaque chanson (étrange, quand il chante il n'a pas d'accent). Certains pensent qu'il parle un peu trop, mais cette tournée du pèlerin ne ressemble à aucune autre et pour nous, ses commentaires font autant partie du spectacle que ses chansons. De plus, les derniers concerts auxquels nous avons assisté avaient lieu à l'étranger et nous ne parlons ni allemand ni italien (ou si peu...), alors là on n'en perd pas une miette. A la buvette, l'ambiance est au beau fixe et il me semble percevoir des bribes de chansons paillardes pendant que le chanteur fait l'apologie de Saint François, heureusement une haie humaine prés de la scène protège les oreilles angéliques de toute écorchure. Pas si angéliques que cela d'ailleurs puisque Angelo fait des allusions aux pulsions libidineuses des jeunes croyants (ou religieux ?) chantant la " musique de dévotion " et commente avec un certain plaisir la tentation de Frère François devant la prostituée dans la chanson Il Sultano di Babilonia e la prostituita. Chanter les textes franciscains ne signifie pas être bigot ou pudibond et son public féminin semble apprécier. Tout est beau dans ce spectacle : lumières, arrangements et charisme de l'artiste qui occupe la scène avec élégance. Quand la dernière chanson de l'Infinitamente Piccolo se termine, j'ai l'impression d'émerger d'un rêve merveilleux sans aucune envie de me réveiller.

Pas le temps de souffler, il enchaîne sur les grands classiques : de la Fiera dell'est à Cogli la prima mela, de la Pulce d'acqua à Caminando, de Si puo fare à ...je ne me souviens plus de tout car l'émotion est forte ; les gens debout chantent. Nous pensions au bout de 2 ou 3 chansons que c'était terminé puisqu'on était dans la phase " rappels ". Et bien nous avons eu droit à une deuxième partie : un miracle (merci Saint François) ; les spectateurs se rassoient

petit à petit, quelques récalcitrants restent à la verticale - à Wunsiedel, nos amis allemands étaient plus disciplinés - et le rêve continue. Angelo danse comme un elfe et n'arrête pas une seconde de jouer. Le public se lève de nouveau transporté par son énergie, une fille danse comme une folle au milieu de la foule. Il termine par une chanson douce dédiée à tous ceux qui s'aiment : Tango ; l'ambassadeur de Saint François précise que cela inclut " pour être, politiquement correct , l'amour entre un homme et un homme et entre une femme et une femme ". Il y en a, c'est sûr, qui écouteront maintenant ses chansons d'une autre oreille (en particulier certaines des plus anciennes, célébrant l'amour romantique ou l'amour courtois).

Saluts devant la scène avec ses musiciens, acclamations et c'est fini...déjà !

Nous nous arrêtons devant le stand Branduardi et j'arrive à atteindre le présentoir où 3 personnes débordées par l'assaut des fans jonglent entre les CDs, les cartons et les billets de banque. Derrière moi des gens poussent pressés d'acheter le dernier produit estampillé Angelo,je me retrouve à moitié à plat ventre sur la table un CD à la main - pire qu'un premier jour de soldes... Nous échangeons dans cette chaude ambiance quelques mots avec mes voisins, eux aussi fans de longue date. Nous quittons le ring pour nous diriger vers la sortie quand nous apercevons un petit groupe devant des barrières à l'arrière de la scène visiblement en quête d'autographes. Il arrive quelques minutes plus tard, souriant et décontracté comme nous l'avons rarement vu et toujours aussi " craquant ". Quel choc d'être si près, je ne m'habitue pas... Nous sortons nerveusement stylos et couvertures de CD, une fan commence à parler à Angelo, lui demandant l'heure de sa naissance dont il n'est pas sûr, sa mère ne s'en rappelant pas . Nous avons l'occasion d'échanger deux mots et d'être tutoyés par le Maestro, quelle joie ! Il se prête complaisamment aux séances photos. Des questions fusent et bien sûr le pourquoi de ses rares apparitions en France, il donne toujours la même réponse : il va là où on le demande. Il mentionne aussi son travail de composition de musique de films qui lui prend du temps. Il parle encore quelques instants avec le groupe puis se dirige vers la sortie en même temps que nous et monte dans une voiture d'où il fait des saluts amicaux à ses fans avant de disparaître dans la nuit bretonne.

Le lendemain nous traînons les pieds dans Guingamp, Angelo nous manque. Pour se remonter le moral on rafle tous les journaux régionaux avec un article sur le concert et là, stupéfaction, nous apprenons qu'il a mangé la veille dans un restaurant à quelques mètres de notre hôtel, restaurant où nous avons failli dîner...Moroses, on regagne nos pénates et l'après-midi nous décidons de visiter la région. Sur le chemin de la gare nous regardons l'enseigne du restaurant

qui a accueilli l'artiste quand soudain...nous le voyons sortir de l'hôtel voisin face à nous une mallette à la main, il se dirige vers une voiture garée tout près ! Il nous faut un instant pour réaliser que c'est vraiment lui et lui faire un sourire et un salut auxquels il répond. Nous continuons notre chemin, en fans discrets et je dois dire un peu sonnés par cette rencontre imprévue. C'est promis, on va mettre un cierge à Saint François de ce pas.

L'ange a pris son envol pour Rome où il composera la musique d'un long métrage franco-italien et il reviendra pour le festival de la Saint Loup car " il apprécie la convivialité des latins du Nord ", dixit Le Télégramme de Guingamp. Nous on y sera, et vous ?

Marie


Visualiser les photos prises par Daniel MAISON